la veille, un état d'esprit

Août les augures et les augustes…

Août, les augures et les augustes, nous invite à une réflexion sur la veille, les prévisions, et les modèles de décisions…

Août le deuxième mois marqué par le pouvoir

Après Juillet et Jules César, rendez-vous cette fois avec Auguste et les augures !
Dans l’ancien calendrier romain, août était le sixième mois de l’année et portait le nom de « Sextilis mensis », dérivé de sextus (« sixième »).
L'empereur Octave, qualifié d'AugusteAoût se substitua à « sextilis mensis » en l’honneur de l’empereur Octave , premier empereur romain de 27 avant JC à 14 après JC, empereur qualifié de « augustus ». Ce changement de nom fut autorisé du fait des principaux événements de la vie et du « règne » de l’empereur Auguste.

La petite histoire des 2 mois consécutifs de 31 jours, une anomalie ?…Et non

En effet Juillet, dont l’origine est liée à Jules César, comptait 31 jours. « Sextilis mensis » n’en comptait que 30. Aussi pour ne pas être en reste avec son père adoptif Jules César, l’empereur Auguste retira 1 jour au mois de février et l’ajouta à son propre mois. L’équilibre était ainsi rétabli.
Qualifiant à l’origine l’empereur Octave, Auguste est devenu un prénom à part entière.

Auguste signifie : vénérable, majestueux, consacré par les augures. Sa racine latine est « augur ». L’étymologie ultérieure de « auguste » est douteuse. Certains auteurs le tirent d’ « augere », accroître. Ainsi l’augure serait celui qui augmente, qui consacre, qui rend auguste. D’autres évoquent un neutre « augus ». L’augure serait alors le priant, celui qui prononce des serments.

Beaucoup d’augures, peu d’augustes

En chacun d’entre nous, sommeille un augure…

Quand bien même, à l’origine, le terme augure désigne les prêtres de l’Antiquité chargés d’observer certains signes, d’en tirer les présages et de conserver les règles de cet art, cette capacité est partagée par chacun d’entre nous.
En effet l’observation, la sélection et l’interprétation des signes ne sont elles pas la base de notre relation à l’environnement et à nous mêmes ? L’idée que l’on se fait de l’avenir d’après certains signes est propre à chacun.
Qui n’a jamais pensé « Ah c’est de bon augure », ou dit « c’est un bon présage ». Enfin qui à la vue ou l’arrivée d’une personne ne l’a jamais qualifiée d’ « oiseau de bon ou de mauvais augure » ?
Et comme disait ma grand-mère « il y a des signes qui ne trompent pas » !

C’est vrai pour chacun d’entre nous, « sentir que le vent est favorable » ou au contraire que « ce n’est pas le jour… ». Cela tient parfois à un détail, un fait paradoxal qui attire notre attention. Ce détail dans l’immédiat, ou plus tardivement suscite une réflexion plus ou moins intuitive. Le cheminement de la pensée est alors parfois complexe. La pensée vagabonde, saute d’un sujet à un autre. La curiosité enrichit cette réflexion de base. On pourrait dire que nous avons des antennes tournées dans toutes les directions, une espèce de radar à 360°…
L’observation de l’environnement est aussi vitale pour toute entreprise ou organisation.

Des prêtres de l’Antiquité …à la veille stratégique en passant par l’AFNOR

Trop d'infos, tue l'info
La veille, une fonction stratégique de l’entreprise

Aujourd’hui le pouvoir réside dans l’accès aux sources d’information et à l’information. L’une des conditions de survie des entreprises est la veille qu’elle exerce quelle que soit son domaine…
« Une armée sans agents secrets est exactement comme un homme sans yeux ni oreilles ». Sun Tzu

Ainsi les augures d’autrefois, relèvent aujourd’hui de la norme . XP X50-053, d’avril 1988 de l’AFNOR (Association française de normalisation) qui présente la veille comme une activité continue et en grande partie itérative visant à une surveillance de l’environnement technologique, commercial…pour anticiper les évolutions.
De grands spécialistes de la veille, tel Humbert LESCA la définissent comme « Le processus collectif continu par lequel un groupe d’individus traquent, de façon volontariste, et utilisent des informations à caractère anticipatif concernant les changements susceptibles de se produire dans l’environnement extérieur de l’entreprise, dans le but de créer des opportunités d’affaires et de réduire des risques et l’incertitude en général. […] L’expression veille stratégique est une expression générique qui englobe plusieurs types de veilles spécifiques telles que la veille technologique, la veille concurrentielle, la veille commerciale, etc. »

Ainsi la gestion de l’information s’organise autour de deux axes : spéculatif (recherche et recueil de l’information) et projectif (évaluation et projection des résultats éventuels) et concerne l’ensemble des fonctions de l’entreprise.

De l’utilité des normes et modèles à l’irrationnalité des décisions

Or Sun Tzu, grand maître de la stratégie, comme ma grand-mère décédèrent sans avoir connu la norme de l’AFNOR. Mais l’un et l’autre assureraient qu’« il y a des signes qui ne trompent pas. ». Ma grand-mère, intelligente bien que peu instruite si ce n’est par l’école de la vie, ajoutait parfois un brin philosophe : « la vie n’est qu’un éternel recommencement ». Ce qu’on appellerait aujourd’hui « modèles » ou « algorithmes ». Bien évidemment ces modèles sont utiles.

Mais comment expliquer alors tant de défaillances, ou de virages ratés ?

Parmi les plus classiques, citons Kodak et la fin de l’argentique, Michelin inventeur en 1900 du fameux guide laissant Tom-Tom filer devant…Ou encore le peu d’empressement à se préoccuper drastiquement du réchauffement climatique…

Bien des explications peuvent être avancées :

En premier lieu, la difficulté à détecter des signaux faibles voire insignifiant, très tôt, afin de se procurer un avantage concurrentiel certain : être le premier et non copier…

« Voir, dans les frémissements du temps, les orages à venir et les soleils nouveaux. »
Imre Lisztöf

« Entendre un coup de tonnerre ne prouve pas qu’on a l’ouïe fine. » Sun Tzu

D’autre part le peu d’importance accordée à observer ce qui sort de notre sphère habituelle. Autrement dit un 360° si ce n’est nombriliste pour le moins réduit à un angle de vue bien faible.
« Sois subtil jusqu’à l’invisible; sois mystérieux jusqu’à l’inaudible; alors tu pourras maîtriser le destin de tes adversaires ». Sun Tzu
Ou encore les dérives de la raison fermée sur elle-même ce que Edgar Morin appelle la rationalisation. C’est-à-dire « la construction d’une vision cohérente, totalisante de l’univers, à partir de données partielles, d’une vision partiale, ou d’un principe unique ».Phénomène bien connu dans les entreprises.
« Une armée doit être preste comme le vent, majestueuse comme la forêt, dévorante comme la flamme, inébranlable comme la montagne ; insaisissable comme une ombre, elle frappe avec la soudaineté de la foudre. » Sun Tzu

Puis bien évidemment les pièges liés au traitement de l’information. Certains sont essentiellement collectionneurs. D’autres y sont sensibles pour l’enrichissement intellectuel. Quelques uns cherchent dans l’information la réponse à des questions immédiates. Bien peu sont ceux qui excellent dans la projection.
Et sans compter les freins liés au modèle mental ou encore les défaillances des fonctions du cerveau parfois trop généraliste, parfois trop sélectif et souvent dans des interprétations douteuses.
Or comme dit Sun Tzu « La victoire n’est que le fruit d’une supputation exacte ».

Enfin une dernière explication et non des moindres, comme le disait Pierre Dac célèbre humoriste « Les prévisions sont difficiles surtout quand elles concernent l’avenir »

Ainsi en chacun de nous sommeille un augure, mais combien d’augustes… ?

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